Conférence de Isabelle Pantin, lors de la journée d’études, Gérard Simon, le philosophe et l’historien , organisée par le laboratoire de recherche (UMR 8163 Savoirs, Textes, Langage) Édouard Mehl (Université de Lille, STL) et Nathalie Queyroux (CAPHÉS)
À une époque où la tentation était forte de réduire l’histoire de la science classique à celle de la mathesis universalis, Gérard Simon (1931-2009) a ouvert une voie parallèle originale, en consacrant une vaste monographie à Kepler. Celui-ci y est décrit comme un Janus bifrons, dont une face regarde vers l’astronomie, les mathématiques, la découverte des trois lois, tandis que l’autre est tournée vers le passé, les sciences curieuses, l’astrologie, la tératologie, l’animisme... bref tout ce qui depuis a été évincé du royaume de la science, et que les historiens regardaient tout au plus chez Kepler comme une curiosité amusante, et une survivance d’un passé aussi inutile que pittoresque. C’est à comprendre cette dualité indissoluble (astronomie-astrologie) qu’a travaillé Gérard Simon, avec un parti-pris qui pourrait passer pour foucaldien (celui de n’accorder aucun privilège d’intelligibilité à l’un ou l’autre de ces visages) mais qui ne l’est nullement, ne fût-ce que parce qu’il aborde Kepler dans une forme de systématicité close. Les principaux acquis de ce grand ouvrage ont ensuite permis de revisiter complètement l’optique ancienne et moderne, moins du strict point de vue de l’histoire des sciences, que du point de vue large, philosophique, et compréhensif, de la « mutation des savoirs ». Cette journée témoignera de l’actualité d’une pensée qui a exercé une influence durable sur toute une génération d’historiens et de philosophes.
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Cursus :
Isabelle Pantin est professeur de Littérature Française (XVIe siècle) à Ecole normale supérieure et chercheur associé à l’Observatoire de Paris (CNRS, Syrte), dans l’équipe d’histoire de l’astronomie. Auparavant, elle a enseigné dans le secondaire, puis elle a été « pensionnaire » à la bibliothèque nationale, directrice de la bibliothèque de Jourdan (à l’ENS), maître de conférences à Paris III, et professeur dans les universités du Mans et de Paris X-Nanterre.
Elle travaille sur l’histoire du livre scientifique, sur la pensée cosmologique à la Renaissance et au début de l’époque moderne, et sur les relations de la science et de la littérature (poésie scientifique, fiction philosophique).
Dernière mise à jour : 13/01/2016