Dans cette première conférence, Judith Butler met en œuvre une interrogation complexe du concept de reconnaissance (Hegel, Foucault, Axel Honneth) pour montrer que la reconnaissance est moins affaire de lutte de personnes ou de consciences que motivée par les "cadres" épistémologiques qui la rendent possible, la délimitent et la distribuent de façon inégale entre les êtres. Le deuil – la possibilité de pleurer une vie qui s’en va – en constitue un critère premier : toutes les vies ne sont pas également reconnues comme dignes d’être pleurées. À l’encontre de ces "cadres de reconnaissance", toujours limitatifs et sources d’inégalité, Butler met en avant une condition universelle de toute vie humaine : sa "précarité". Toute vie humaine est placée sous le signe de l’interdépendance à l’égard des autres, et cette vulnérabilité doit être reconnue pour qu’une vie soit vécue.
Répondants par ordre de prise de parole :
– Étienne Balibar, professeur émérite à l’université Paris X-Nanterre et professeur à l’université d’Irvine (Californie), auteur de très nombreux ouvrages dont Très loin et tout près (Fayard, 2007) sur la notion de frontière à l’époque de la mondialisation ;
– Marie Gaille, chercheur CNRS au Centre de recherche, sens, éthique, société (CERSES, Paris V), spécialiste d’éthique et politique de la santé, notamment des questions de reconnaissance de la vie et de la maladie, domaine dans lequel elle a publié de nombreux articles ;
– Guillaume Le Blanc, professeur de philosophie à l’université Bordeaux III, qui a dirigé et contribué à un ouvrage collectif sur l’œuvre de Judith Butler (Judith Butler, Troubles dans le genre, trouble dans le sujet, PUF, 2009) et qui s’intéresse depuis plusieurs années aux questions de précarité et d’identité dans la société contemporaine.
Voir aussi
Cursus :
Judith Butler (née en 1956 à Cleveland) est philosophe américaine, professeur au département de rhétorique et de littérature comparée de l’université de Berkeley.
Depuis quelques années, ses travaux sur le genre sont pleinement reconnus en France à la suite, notamment, d’un colloque tenu en 2005 à l’ENS et de la traduction, quinze ans après sa publication aux États-Unis, de Trouble dans le genre (La Découverte, 2005).
Judith Butler utilise, critique et poursuit les travaux de Derrida, Deleuze et surtout Foucault pour construire une théorie des identités sexuelles également appuyées sur une élaboration du concept austinien de performatif. Dans les années 2000, et depuis le 11 septembre 2001 notamment, elle a élargi son horizon à des questions plus universellement politiques comme, par exemple, celle de la constitution des vies humaines en tant que telles (Vie précaire, Amsterdam 2005) ou l’inégalité des vies humaines telles que les médias les présentent et les font être (Frames of War: When is Life Grievable?, Verso 2009).
Elle a été membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine dont les travaux ont commencé le 4 mars 2009.
Ses publications les plus récentes incluent Ce qui fait une vie (La Découverte, 2010), Rassemblement (Fayard, 2016), La Force de la non-violence (Fayard, 2021), Le vivable et l’invivable, en conversation avec Frédéric Worms (PUF, 2021), et enfin Dans quel monde vivons-nous ? Phénoménologie de la pandémie (Flammarion, 2023).
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