Exposé de Édith Parmentier lors du colloque "Pierre angulaire : la Bible au croisement des disciplines" organisé par l'AOROC.
Les rois bibliques sont absents des chapitres hérodiens de la Guerre et des livres hérodiens des Antiquités, où seuls sont cités David et Salomon ; encore ces derniers ne le sont-ils que de façon indirecte, à propos des monuments réalisés par le programme architectural d’Hérode. Néanmoins, le modèle de la royauté biblique apparaît comme une ombre portée sur le récit du règne d’Hérode, en particulier dans l’emploi du titre de « roi des Juifs ». Ce titre, qui est rare dans l’œuvre de Josèphe, où il n’apparaît en tout et pour tout que quinze fois, désigne d’anciens rois d’Israël dans la moitié des cas et, dans l’autre moitié, qualifie Hérode.
Les anciens rois d’Israël désignés comme « roi[s] des Juifs » sont Saül, David et Iéchonias, tous les trois dans un contexte de guerre entre peuples où cette titulature prend le contenu spécifique d’une royauté « ethnique » et même nationale. Par ailleurs, l’appellation se charge aussi d’un sens messianique dans le cas de David, puisqu’elle est associée par Josèphe à une prophétie. Or, l’historien applique le même schéma à Hérode, pour qui le titre de « roi des Juifs » est rattaché à une prédestination prophétique.
Ainsi, par le titre de « roi des Juifs », Flavius Josèphe établit une continuité entre les rois d’Israël et Hérode, alors même que cette titulature n’est validée par aucun texte historique ou officiel romain : dans l’espace public (sources épigraphiques), Hérode apparaît toujours comme un roi à titre personnel, avec une titulature dont tous les éléments se rattachent à Rome (« ami des Romains » ou « ami de César »). En lui appliquant la qualité de « roi des juifs », Flavius Josèphe propose une représentation de la royauté qu’il récupère de la tradition biblique. Il renforce la légitimité institutionnelle du roi par la conformité au modèle judaïque et, conformément à ses propres objectifs historiographiques, intègre le règne d’Hérode dans la continuité d’une histoire religieuse spécifique.
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Cursus :
Édith Parmentier est Maître de conférences en histoire ancienne.
Cliquer ICI pour fermerDernière mise à jour : 21/06/2016