"Le changement climatique est certainement un des risques majeurs
auxquels l’humanité devra faire face dans les prochaines décennies. Ce
problème qui nous concerne tous, et dont nous portons une part variable
de responsabilité, est sans précédent dans son aspect complexe et
parfois difficile à prévoir.
Notre société a déjà fait face à d’autres risques, affectant notamment
l’environnement ou la santé humaine (ozone, pluies acides, amiante,
pollutions chimiques, radioactivité, manipulations génétiques...).
Ceux-ci posent – ou ont posé – des problèmes scientifiques et
techniques, engendrant également des problèmes d’ordre éthique. Aucun ne
présente néanmoins le même niveau de complexité que le changement
climatique.
Comprendre l’évolution du climat exige de considérer le système
climatique à la fois dans sa globalité et dans ses menus détails. Ce
système comprend des compartiments très divers comme l’atmosphère,
l’hydrosphère, notamment les océans, la cryosphère, en particulier les
calottes de glace polaires, la biosphère et enfin la lithosphère. Il est
nécessaire d’appréhender cette complexité dans l’espace, de la
stratosphère à l’océan profond, à toutes les latitudes, des calottes de
glaces polaires aux tourbières tropicales. L’échelle des processus
physico-chimiques va des invisibles noyaux de condensation aux cellules
de convection de Hadley mettant en mouvement une partie majeure de la
masse atmosphérique. Cette diversité spatiale s’accompagne d’une extrême
diversité dans les échelles de temps. Des éruptions volcaniques, qui
durent quelques jours, doivent être prises en compte au même titre que
de lentes variations, sur des millions d’années, de la géométrie de
l’orbite terrestre.
Il est donc malheureusement impossible à une personne seule de conduire
des recherches pointues et de parler avec compétence sur tous ces
sujets, aussi bien aux autres scientifiques qu’aux journalistes et aux
décideurs, ainsi qu’au grand public. Cette diversité dans l’espace, dans
le temps, dans la nature même des processus, rend nécessaire la
collaboration entre scientifiques provenant d’horizons très variés, de
la biologie moléculaire à l’astrophysique. Une telle synergie des
connaissances est indispensable et fructueuse. Elle ne conduit pas à une
dilution des compétences qui aboutirait à un consensus inutile : cette
dérive est évitée grâce aux débats ouverts entre chercheurs et aux
mécanismes d’expertise de la communauté scientifique, notamment
l’évaluation des travaux par les pairs et la reproduction des résultats
par des équipes indépendantes.
Afin d’illustrer le propos, j’aborderai quelques exemples de débats
récents sur le climat en insistant sur les principes solidement établis
et les idées incertaines et parfois fausses qui persistent à l’extérieur
de la communauté des chercheurs." Edouard bBard
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Cursus :
Edouard Bard est climatologue et géologue, spécialiste des océans..
Il a travaillé et cherché auprès du CEA(Commissariat à l'Energie atomique); à Columbia et Harvard puis à Marseille.
Depuis 2001, il est profeseur au Collège de France, titulaire de la chaire Evolution du cilimat et de l'océan.
Il est responsable de l'équipe de géochimie et de paléoocéanographie au CEREGE.
Dernière mise à jour : 10/04/2012